Alors que de nombreux investisseurs considéraient que le retour au pouvoir de Donald Trump renforcerait la thématique de l’exceptionnalisme américain, le schéma a été tout autre au premier trimestre 2025 : l’économie américaine a montré des signes de ralentissement, les marchés actions américains ont corrigé et le dollar s’est affaibli. À l’inverse, le sentiment à l’égard de l’Europe s’est nettement amélioré, en raison notamment d’un changement radical de la politique budgétaire en Allemagne.
Une économie américaine moins exceptionnelle
Le paysage macroéconomique a connu d’importants changements au premier trimestre. Alors que l’économie américaine avait surpris par sa vigueur l’année dernière, la conjoncture s’est avérée nettement moins favorable sur le début d’année. La consommation des ménages, qui avait été le principal moteur de la croissance, a montré des signes de fatigue, tandis que la confiance des agents économiques s’est détériorée. La politique protectionniste de Donald Trump a été beaucoup plus dure que prévue mais aussi très confuse, provoquant une réelle inquiétude sur l’inflation chez les ménages et un net choc d’incertitude pour les entreprises. En revanche, le marché du travail a fait preuve de résistance. En Europe, le sentiment s’est nettement amélioré, dans le sillage de publications économiques meilleures que prévues et de l’annonce par l’Allemagne d’un plan de relance budgétaire historique au début du mois de mars. Particulièrement ciblée par les annonces tarifaires de Donald Trump, et toujours en proie à un ralentissement de son secteur immobilier, la Chine a renforcé ses mesures de relance.
Nette surperformance des actions européennes
Les inquiétudes sur la croissance américaine et l’émergence de nouveaux acteurs dans le domaine de l’intelligence artificielle ont amené les investisseurs à réévaluer leurs attentes sur les marchés actions américains. Le S&P 500 a baissé de 4,6% au premier trimestre, sous l’effet d’un recul de 16% des « sept magnifiques ». Ces valeurs avaient connu une forte croissance au cours des deux dernières années et leurs multiples de valorisation avaient atteint des niveaux très élevés. En même temps, l’Euro Stoxx a progressé de 7,4%, emmené par les secteurs les plus cycliques (banques, consommation discrétionnaire…)et ceux qui sont les plus susceptibles de profiter d’une résolution du conflit en Ukraine, par le biais de la baisse des coûts de l’énergie (industrie, matériaux de base…). Dans le reste du monde, les marchés actions ont reculé de 3,4% au Japon, tandis qu’ils ont progressé de 2,9% dans les pays émergents.
Evolution dispersée des taux d’intérêt
À l’image des marchés actions, la dispersion a été forte sur les marchés obligataires. Le taux à dix ans de l’Etat allemand a augmenté de 37 points de base au premier trimestre, à la suite de l’annonce du plan de relance allemand, tandis que le taux à dix ans du Trésor américain a baissé de 36 points de base, en raison des craintes sur la croissance. Cela s’est traduit par un rebond de l’euro de +4,5% face au dollar.
Au niveau des banques centrales, la Fed a maintenu son taux directeur à 4,25% – 4,50%, la diminution de ses prévisions de croissance s’équilibrant avec une révision à la hausse de ses prévisions d’inflation. En Europe, les bonnes nouvelles sur l’inflation ont permis à la BCE de baisser ses taux à deux reprises, portant le taux de dépôt à 2,50%.
Fin de l’exceptionnalisme américain ?
Suite aux élections de novembre dernier, nous nous interrogions sur les ruptures que la nouvelle administration américaine semblait déterminée à opérer par rapport à l’ordre économique des quarante dernières années. Les annonces récentes confirment une approche très tranchée. En matière de politique commerciale, l’approche choisie est pour le moins maximaliste.
Même si Donald Trump a opéré un revirement spectaculaire sur les droits de douane réciproques, le taux de base de 10% pour tous les pays a été maintenu. De même, les taux sur l’acier, l’aluminium et les voitures ont été maintenus à 25%. Des annonces sur les produits pharmaceutiques et les semi-conducteurs doivent encore être faites.
Quant à l’augmentation des droits de douanes sur la Chine à 145%, elle constitue un cran supplémentaire dans la guerre commerciale entre les deux plus grandes économies du monde. Le recul de Donald Trump vis-à-vis des autres pays rendra sans doute une désescalade avec la Chine d’autant plus compliquée.
Toutes choses égales par ailleurs, le taux moyen sur les importations américaines augmentera à près de 30%, contre près de 2% auparavant, un niveau inédit depuis le début du vingtième siècle. Une augmentation de cette ampleur représente un montant d’environ 1000 milliards de dollars sur une base annuelle, soit environ 3% du PIB. Il s’agit donc d’un choc fiscal très important à absorber. Le taux moyen pourrait diminuer si les importations chinoises venaient à devenir négligeables, mais l’arrêt brutal d’environ 450 milliards de dollars d’importations américaines risque d’entraîner de fortes perturbations dans les chaînes de production.
Cette situation aura un impact notable sur l’économie américaine. L’incertitude va continuer de peser sur l’investissement. Les achats anticipés pour se prémunir contre l’augmentation des droits de douane pourraient créer un effet de décompression par la suite. Par ailleurs, le DOGE devrait provoquer des baisses d’emplois qui se chiffrent en centaines de milliers au niveau fédéral.
Les vents contraires nous semblent donc importants pour l’économie américaine. En l’état des choses, il faut s’attendre à un net ralentissement de la croissance américaine au cours des prochains mois.
Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et s’apprécient à l’issue de la durée de placement recommandée.
Les données de cet article proviennent de Bloomberg en date du 31 mars 2025.
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Voir aussi : https://latribune.lazardfreresgestion.fr/economie-lettre-de-la-gestion-privee-1er-trimestre-2025/
L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 28 avril 2025 et est susceptible de changer.
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