Pierre Gattaz, d’industriel à viticulteur
Certaines personnes semblent avoir plusieurs vies en une. Tel est le cas de Pierre Gattaz, dont les nombreuses activités et engagements nécessiteraient, pour le commun des mortels, de disposer du don d’ubiquité. Invité par Lazard Frères Gestion le 23 juin à l’occasion d’une conférence, l’ancien « patron des patrons » est revenu sur son parcours et ses convictions.
Pour le grand public, Pierre Gattaz est avant tout l’ancien président du Mouvement des entreprises de France (MEDEF). En poste de 2013 à 2018, il a notamment incarné la voix des chefs d’entreprises sous la présidence de François Hollande, dont l’adversaire désigné était « le monde de la finance ». Il en aurait fallu davantage pour mettre à mal l’indéfectible enthousiasme de Pierre Gattaz, qui n’a pas hésité à relever les défis liés à cette fonction pour convaincre ses interlocuteurs que la France restait une terre d’opportunités et non le pays « anti-business » que beaucoup imaginaient.
Des convictions portées au sommet de l’Etat
En 2013, le challenge était d’autant plus difficile à relever que la France souffrait de nombreux maux. Parmi eux : un chômage supérieur à 10%, la crainte d’une crise de la dette publique, une hausse des taxes et impôts dans le cadre de la politique d’austérité, ou encore un marché du travail peu compétitif, notamment face à l’Allemagne. L’objectif de Pierre Gattaz a dès lors été de promouvoir des solutions et des réformes en échangeant avec les membres du gouvernement et les syndicats. Lentement mais sûrement, les efforts ont porté leurs fruits. « Les réformes Hollande-Valls, puis Macron, ont permis de réduire progressivement le chômage » constate-t-il a posteriori. « J’admire Myriam El Khomri et Manuel Valls car ils ont été très courageux pour mener la réforme de la loi Travail ».
Ainsi, entre 2014 et 2019, la France a été en mesure de créer un million d’emplois dans le secteur privé grâce aux efforts réalisés, tout en bénéficiant d’une conjoncture favorable. Désormais à 7,1% au T1 2023, le chômage est même revenu à son plus bas niveau depuis 40 ans. « Et nous pouvons encore descendre à 5% si l’on continue les réformes » estime Pierre Gattaz, pour qui l’atteinte de cet objectif devra passer par une réduction des dépenses publiques. Le but : alléger les impôts et taxes qui pèsent sur le marché de l’emploi, ce qui permettrait à la fois de réduire le coût du travail pour les entreprises et de limiter la taxation des revenus salariés.
Cette volonté d’aller de l’avant en assumant ses convictions fait partie de son caractère. « Il ne faut jamais hésiter à tester des idées. En Allemagne, lorsqu’une nouvelle loi est adoptée, elle fait ensuite l’objet d’une évaluation pour vérifier si son objectif a été atteint ». Si tel n’est pas le cas, cette loi peut être amendée ou abrogée. « Nous devrions adopter la même approche en France » affirme-t-il. Une manière d’appliquer, au niveau des institutions, une approche d’entrepreneur capable d’innover et de tirer parti de ses échecs lorsque ceux-ci surviennent.
Une vie entre Paris, Bruxelles et le Lubéron
Entreprendre est justement une notion qu’il connaît bien. Ses engagements politiques ne sont en effet que l’une de ses nombreuses facettes. Pierre Gattaz est né dans une famille d’industriels : en 1992, à l’âge de 33 ans, il prend la succession de son père à la tête de l’entreprise Radiall, spécialisée dans les connecteurs électroniques pour les télécommunications, la défense, les appareils médicaux et l’automobile notamment. Sous sa houlette, la société se déploie aux Etats-Unis et en Asie dans les années 1990, s’adapte à la crise des télécoms au début des années 2000, développe ses activités dans l’aéronautique et poursuit sa croissance en procédant aussi à des acquisitions.
Cette expérience lui permet de devenir président de la Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC) à partir de 2007, président du Groupe des fédérations industrielles à partir de 2010 ou encore membre du bureau du Conseil national de l’industrie (CNI) à partir de 2011. Ces mandats prennent fin en 2013 lorsqu’il prend la tête du MEDEF pour une durée de cinq ans. Depuis, sa volonté de faire bouger les lignes ne l’a pas quitté. Il a notamment présidé l’association patronale BusinessEurope de 2018 à 2022, voyageant ainsi régulièrement à Bruxelles, puis a fondé l’association « Y croire & Agir » en 2020. Cette dernière a pour but d’aider les personnes sur le chemin de la réinsertion professionnelle dans toute la France, qu’il s’agisse de trouver un emploi ou de créer sa propre entreprise. L’association propose notamment à ces personnes des formations adaptées et gratuites pour prendre un nouveau départ dans la vie active.
Surtout, Pierre Gattaz n’a pas perdu son envie d’entreprendre. Loin de l’univers industriel de Radiall, l’ancien « patron des patrons » a acquis en 2017 le château de Sannes dans le Lubéron et y a repris une exploitation viticole qu’il a entièrement convertie en culture « bio ». Le domaine produit désormais plus de 100 000 bouteilles par an. De quoi remplir une vie ? Pas tout à fait ! Car Pierre Gattaz est aussi écrivain. Son sixième ouvrage, Le coeur et le courage, est sorti en 2021 aux éditions Débats publics. Un essai sur l’objectif du « plein-emploi » avant l’heure, redonnant confiance dans la capacité de la France à évoluer pour réduire les fractures territoriales et donner sa chance à chacun. En attendant « Enthousiasmez-vous ! » aux Editions du rocher, promis pour le mois d’octobre 2023.
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Voir aussi : https://latribune.lazardfreresgestion.fr/patrimoine-lettre-de-la-gestion-privee-3eme-trimestre-2023/
L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 20 juillet2023 et est susceptible de changer.
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