Dans le cadre de ses actions de mécénat, Lazard Frères Gestion souhaite apporter son soutien aux artistes en conviant chaque mois des musiciennes et musiciens de renom à faire résonner leurs accords malgré le silence des salles de concert. Pour cette seconde vidéo, nous avons le plaisir de vous faire découvrir Eloïse Bella Kohn, pianiste française, qui a accepté de répondre à nos questions.
1/ Pouvez-vous nous présenter votre parcours ? Comment vous est initialement venue cette envie d’apprendre à jouer de votre instrument ?
Je suis née à Paris dans une famille mélomane, en partie d’origine hongroise, où la musique était très présente. Mes parents se sont rencontrés dans un chœur, et ma grande sœur, aujourd’hui médecin, a appris le violon. Petites, nous avons beaucoup joué en duo. Mes parents m’ont inscrite à 3 ans et demi à l’école de musique Yamaha, une méthode japonaise en cours de groupe. Lorsqu’ils ont réalisé que j’avais l’oreille absolue, j’ai aussi eu des cours particuliers de piano et de composition. Jusqu’à mon entrée au CNSM de Paris à l’âge de 15 ans, j’ai poursuivi l’étude de la composition en parallèle. À 21 ans, je suis sortie du Conservatoire avec mes diplômes de piano et de deux classes d’écriture supérieure. J’ai suivi deux cycles de type doctorat en Allemagne, puis en Autriche, dans la classe d’une célèbre pianiste russe.
Même s’il est loin d’être évident de trouver des concerts en sortant du conservatoire (et encore plus difficile si l’on ne vient pas d’une famille du milieu musical), j’ai eu la chance de commencer à me produire régulièrement grâce à quelques musiciens, fondations et structures qui m’ont recommandée auprès de salles et festivals. Aujourd’hui, je suis heureuse de pouvoir vivre entièrement de mes concerts, principalement en Europe et notamment en Allemagne ou en Autriche. Ce sont des pays où la musique classique occupe une place très importante dans la société.
2/ Pouvez-vous nous parler de ce qui vous plaît particulièrement dans cette activité ?
Ce qui m’a séduite au fil des années, c’est le répertoire infini du piano. Il s’étend du baroque à la musique contemporaine, permet d’aborder des transcriptions d’œuvres orchestrales, sans parler de toute la littérature en musique de chambre, en mélodie avec la voix. Une vie ne suffirait pas pour l’explorer !
Ce qui me plaît également dans ce métier, c’est la sensation que l’on n’a jamais fini d’apprendre, d’explorer, de retravailler, de s’améliorer. Contrairement à la danse classique qui m’attirait beaucoup étant enfant, et que je pratique encore, c’est un métier que l’on peut poursuivre toute sa vie.
3/ Quel morceau avez-vous choisi de jouer dans cette vidéo ? Que représente-t-il pour vous ?
Il s’agit d’une sonate pour flûte et clavecin de Jean-Sébastien Bach (BWV 1031), dont le magnifique mouvement lent, une Sicilienne, a été transcris pour le piano par Wilhelm Kempff. J’admire beaucoup ce légendaire pianiste allemand. J’ai d’ailleurs eu la chance de travailler deux fois avec Idil Biret, une pianiste turque, qui a été son élève pendant de nombreuses années. Le hasard m’a aussi fait rencontrer une jeune femme de mon âge qui est l’arrière-petite-fille de Kempff ; elle m’a présenté son père qui m’a raconté plusieurs anecdotes passionnantes sur son grand-père.
Je trouve que la musique de Bach a un effet apaisant, contemplatif voire introspectif, que je trouve particulièrement bienvenu en cette période où il est difficile de se projeter dans le futur.
4/ Que change pour vous la fermeture des salles de concert ?
Je suis très reconnaissante de la proposition qui m’a été faite par Lazard Frères Gestion de participer à la série de vidéos commandées depuis quelques mois à de jeunes interprètes pour les soutenir. En effet, la fermeture des salles de concerts représente un arrêt complet de notre activité de concertiste, et donc de nos revenus. Pour ma part, je suis intermittente du spectacle, donc malgré des revenus divisés par trois ou quatre certains mois, je ne manque de rien. En revanche, cette crise met en danger de disparition de nombreuses structures et métiers du milieu musical (salles, festivals, orchestres, agences etc.), et fragilise évidemment les jeunes artistes pas encore tout à fait établis. J’espère que tout cœur que la vie culturelle pourra reprendre dans un futur proche.
Voir aussi : https://latribune.lazardfreresgestion.fr/interview-dolivia-gay-et-dalia-kuznecovaite/