En annonçant le 26 juin 2015 à minuit la tenue d’un référendum sur le programme d’aide de 15,5 Mds € en cours de négociation avec les institutions et l’eurogroupe, le premier ministre grec, Alexis Tsipras, a choisi de porter la situation à un nouveau niveau de tension.
Sans doute espérait-il obtenir à la fois l’extension d’un mois du programme d’aide actuel, permettant de passer la tenue du referendum, et un assouplissement de la position des institutions. La réaction européenne a au contraire été très dure, considérant que la décision d’Alexis Tsipras s’apparentait à une rupture unilatérale des négociations. Cette réaction s’explique sans doute par deux éléments. Le premier est une grande lassitude, pour ne pas dire un grand agacement, face à un couple Tsipras / Varoufakis jugé peu fiable et peu sérieux. Le second est que l’extension d’un mois du programme, présentée par Alexis Tsipras comme une formalité, aurait été en fait très délicate puisque cela aurait de facto forcé les institutions à accorder des prêts à la Grèce pour lui permettre de tenir durant ce mois.
Les conséquences de ces décisions n’ont pas tardé à se faire jour avec des files d’attente aux guichets des banques et aux distributeurs. Un milliard d’euros aurait été retiré samedi. Dans ce contexte, l’attitude de la BCE était l’élément déterminant du destin à court terme de la Grèce. Celle-ci a choisi de ne pas précipiter une sortie de la zone euro en ne supprimant par l’accès des banques à l’assistance de liquidité d’urgence(ELA), ce qu’elle aurait pu faire dans une situation de rupture complète des négociations. Elle a donc choisi de maintenir l’ELA à son niveau de vendredi dernier (89 Mds €). L’ampleur probable des demandes de retrait rendait nécessaire la mise en place de contrôle des capitaux. Le gouvernement a en effet annoncé que les banques et la bourse grecques seront fermées jusqu’au 7 juillet. Les retraits de liquides seront limités à 60 €. Ces contrôles des capitaux vont évidemment fortement perturber très fortement l’activité économique alors que le pays était déjà retombé en récession depuis près de six mois.
Le référendum se tiendra donc dimanche 5 juin : il sera demandé aux grecs d’accepter ou non le projet des créanciers. On peut évidemment s’interroger sur la capacité d’organiser un scrutin en si peu de temps. On peut aussi s’interroger sur la nature exacte du programme d’aide tel qu’il sera présenté. La Commission Européenne a publié le projet en son état au 26 juin à 20h00, mais il est clair que dans l’esprit des européens, ce plan ne représente qu’un document de travail et le programme d’assistance actuel du FESF expire au 30 juin. Une fois le programme du FESF expiré, le protocole d’accord discuté n’a plus aucune valeur, le gouvernement grec devant renégocier avec ses créanciers un nouveau plan d’aide, qui devra être ratifié par tous les pays de la zone euro. C’est pourquoi Alexis Tsipras a demandé une prolongation temporaire de celui-ci.
La paralysie de l’économie grecque sur la semaine à venir risque d’avoir un impact sur le référendum : reste à savoir lequel ? La faute retombera-t-elle sur le gouvernement ou sur les créanciers ? Le gouvernement a pour l’instant appelé à voter « non ». Si la population fait ce choix, il est difficile de voir ce qui restera pour empêcher une sortie du pays de la zone euro.
Pour l’instant, les sondages plaident plutôt pour une victoire du oui. Mais ces enquêtes ont été réalisées avant l’annonce du référendum et mentionnaient explicitement le lien entre les mesures à prendre et le maintien au sein de la zone euro. Le soutien des grecs au plan d’aide aurait pour conséquence une crise politique dans le pays, Tsipras et Syriza pouvant difficilement se maintenir au pouvoir après avoir appelé à voter contre. Les députés modérés de Syriza feront ils sécessions pour constituer un gouvernement d’unité nationale ? Faudra-t-il attendre de nouvelles élections ? Bref, si le oui l’emporte, de nombreuses questions demeureront. Néanmoins, la porte resterait ouverte à un nouvel accord.
La Grèce va donc certainement faire défaut auprès du FMI, ce qui coupera le pays de toute aide supplémentaire de l’institution internationale. Pour autant, ce qui compte pour la situation du pays reste la situation de liquidité du secteur bancaire grec. Si la BCE se retrouvait contrainte par le comportement des grecs de couper l’ELA, le pays n’aurait plus d’autre choix que de créer sa propre monnaie pour soutenir ses banques. A ce titre, le 20 juillet, date à laquelle la Grèce doit rembourser près de 3,5 Mds EUR à la BCE, est une date clé.
En résumé
Au début de cette semaine à haut risque, la probabilité de sortie de la Grèce de la zone euro a fortement augmenté. Si le référendum se solde par une victoire du non, le grexit deviendrait une quasi-certitude. En revanche, la victoire du oui ne résoudrait pas toutes les questions.
Julien-Pierre Nouen, Économiste – Stratégiste
Les marchés risquent donc de rester très volatils d’autant que la conviction qu’un accord finirait bien par être trouvé était très répandue parmi les investisseurs. Pour autant, nous maintenons notre scénario d’un impact au final limité de la crise grecque. Depuis la forte réduction des expositions bancaires au pays, le principal canal de contagion est celui des spreads. Le mécanisme européen de stabilité est en place, la BCE a les outils et la légitimité juridique (depuis le dernier jugement de la CEJ) pour intervenir afin d’éteindre l’incendie. L’amélioration de la conjoncture dans la zone euro se confirme, et les PMI flash du mois de juin confirment que le problème grec semble avoir peu d’impact sur l’activité des entreprises. La forte volatilité actuelle nous amène à rester prudents, mais nous restons très positifs sur les actions de la zone euro.
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