Point conjoncturel – Octobre 2019

Zone euro

La BCE renforce son soutien à l’activité

A l’occasion de son avant-dernière conférence à la tête de la BCE1, Mario Draghi a annoncé, le 13 septembre, un nouveau paquet de mesures accommodantes. Celui-ci comprend notamment : une baisse de 10 points de base du taux de dépôt, à -0,50% ; un mécanisme d’exonération partielle pour certaines banques, afin d’amortir les effets négatifs de cette baisse du taux de dépôt sur leur compte de résultat ; le redémarrage du QE2 à hauteur de 20 milliards d’euros par mois, sans limite de temps ; des conditions plus favorables pour le TLTRO 33 et un renforcement de la forward guidance4 qui lie désormais l’évolution des taux d’intérêt à celle de l’inflation.

Mario Draghi a justifié ces annonces par le ralentissement de la croissance dans la zone euro au cours des derniers trimestres, la persistance des incertitudes internationales et la faiblesse des tensions inflationnistes. Ces éléments sont reflétés par les nouvelles prévisions de la BCE, mettant en évidence une dégradation de ses perspectives de croissance et d’inflation pour 2019 et 2020, par rapport aux précédentes prévisions de juin dernier. Celles-ci tablent maintenant sur une croissance de +1,1% (-0,1 point) cette année et de +1,2% (-0,2 point) l’année prochaine, associée à une inflation de +1,2% (-0,1 point) et de +1,0% (-0,4 point).

La publication des enquêtes PMI5 de septembre a apporté une mauvaise surprise. Après avoir été relativement stable depuis le début de l’année, le PMI composite pour l’ensemble de la zone s’est replié de 51,9 à 50,1, un niveau cohérent avec une croissance proche de 0,5% en rythme trimestriel annualisé. Ce repli reflète notamment une poursuite de la dégradation du PMI manufacturier en Allemagne, de 43,5 à 41,7, son plus bas niveau depuis 10 ans.

Les statistiques d’activité allemandes disponibles jusqu’en août sont pour l’instant cohérentes avec une croissance du PIB légèrement positive au troisième trimestre, après un repli de 0,3% en rythme annualisé au deuxième trimestre.

Les données relatives à la consommation dans la zone euro résistent bien et le marché du travail continue de s’améliorer. Si les ventes au détail ralentissent un peu au troisième trimestre, elles demeurent sur une tendance haussière, affichant une hausse de 2,0% sur un an. Les ventes de voitures ont chuté de 18,7% en septembre mais les statistiques des deux derniers mois ont été perturbées par un nouveau changement de normes. Le taux de chômage poursuit sa baisse et se situe désormais à 7,4% en août, un niveau proche de son point bas historique de 7,3% en 2008.

BCE1 : la Banque centrale européenne (BCE) est l’institution monétaire de l’Union Européenne. Elle siège à Francfort et est responsable du système monétaire de l’Union européenne (UE) et de sa devise, l’euro.

QE2(Assouplissement quantitatif) : type de politique monétaire dite « non conventionnelle » consistant pour une banque centrale à racheter massivement des titres de dettes aux acteurs financiers.

TLTRO 33 : série d’opérations ciblées de refinancement de long terme lancée par la BCE afin de conserver des conditions de crédit favorables dans la zone euro et maintenir une politique monétaire accommodante.

Forward guidance4 : outil utilisé par une banque centrale pour exercer son pouvoir dans la politique monétaire dans le but d’influencer, avec ses propres prévisions, les anticipations du marché quant aux niveaux futurs des taux d’intérêt.

PMI5 : les indices PMI sont des indicateurs de confiance qui synthétisent les résultats des enquêtes menées auprès des directeurs d’achats des entreprises. Une valeur supérieure à 50 indique un sentiment positif dans le secteur concerné (manufacturier ou service).

 

Voir aussi : Zone euro : 2% d’inflation, un objectif dangereux pour la stabilité macroéconomique ?

 

Etats-unis

Des craintes de récession prématurées

A l’issue de sa réunion de septembre, la Fed a baissé son taux directeur de 25 points de base pour la deuxième fois d’affilée, comme attendu, le portant dans la fourchette de 1,75%-2,00%. La Fed considère que l’économie américaine se porte bien dans l’ensemble mais que le ralentissement de l’économie mondiale et les incertitudes internationales posent des risques importants justifiant d’assouplir la politique monétaire, par précaution.

Le graphique des « dots » et le compte rendu de cette réunion ont révélé des divisions importantes au sein du Comité de politique monétaire1. La médiane des prévisions des 15 membres ne donne plus aucun mouvement de taux cette année ni l’année prochaine mais 8 membres tablent sur une baisse supplémentaire en 2020. Les marchés obligataires intègrent plusieurs baisses de taux dans les deux ans à venir mais si les incertitudes internationales se résorbent les anticipations pourraient s’ajuster.

Lors de sa conférence de presse, Jérôme Powell a expliqué que les épisodes de tension du taux de refinancement sur le marché monétaire n’avaient pas d’incidence sur les perspectives économiques ou sur la capacité de la Fed à contrôler les taux d’intérêt. Afin d’éviter de nouvelles perturbations, la Fed a annoncé le lancement d’un programme d’achat de bons du Trésor américain à partir du 15 octobre, à hauteur d’environ 60 milliards de dollars par mois au moins jusqu’à la fin du deuxième trimestre 2020.

Côté conjoncture, les enquêtes ISM2 montrent un secteur manufacturier qui reste sous pression et un début de contagion au secteur des services.

L’ISM manufacturier a baissé de 49,1 à 47,8 en septembre, après un passage sous les 50 en août, et l’ISM non-manufacturier s’est replié de 56,4 à 52,6, avec une forte baisse de la composante des nouvelles commandes. Ces mauvais chiffres ont ravivé les craintes de récession mais celles-ci sont sans doute prématurées.

D’autant que le rebond du secteur résidentiel américain se confirme et que les données de l’emploi restent globalement bonnes. Ces dernières ont ralenti cette année, ressortant à 154 000 en moyenne sur les six derniers mois contre plus de 230 000 en 2018, mais ce ralentissement était à attendre après dix années d’expansion et un taux de chômage qui se rapproche de son point bas historique, à 3,5% en septembre, un record depuis 1969.

Le comité de politique monétaire1 : le Federal Open Market Committee est un organe de la Fed chargé du contrôle de toutes les opérations d’open market (achat et vente de titres d’État notamment) aux États-Unis.

ISM2 : cet indice est séparé en deux grandes familles : l’ISM manufacturier, reflétant la santé du secteur aux USA et l’ISM services, plus spécifique aux activités tertiaires.

 

Voir aussi : États-Unis : une situation très similaire à 2016

 

Poursuite du ralentissement de la croissance

Le ralentissement de la croissance chinoise s’est poursuivi au troisième trimestre, celle-ci passant de +6,2% à +6,0% sur un an, un rythme qui se situe dans la fourchette basse de l’objectif de 6,0%-6,5% visé par les autorités cette année. Ce ralentissement s’explique principalement par celui du secteur secondaire où la croissance a ralenti de +5,6% à +5,2% sur un an.

Les données d’activité de septembre montrent une dynamique plus favorable à la fin du troisième trimestre, après des mauvais chiffres en juillet et en août. La production industrielle a accéléré de +4,4% à +5,8% sur un an, les ventes au détail de +7,5% à +7,8% sur un an et l’investissement de +4,2% à +4,7% sur un an. En revanche, le commerce extérieur reste faible, avec notamment une poursuite du ralentissement des exportations vers les Etats-Unis (-21,9% sur un an).

En regardant de plus près ces données du troisième trimestre, ce sont surtout l’investissement dans le secteur manufacturier et les ventes de voitures qui ont ralenti. Ces dernières avaient fortement accéléré au deuxième trimestre avant la mise en place de nouvelles normes anti-pollution à partir du 1er juillet dans plusieurs villes, les concessionnaires baissant leurs prix pour écouler leur stock de véhicules hors normes. Depuis, elles ralentissent par contrecoup. Le reste de l’économie tient mieux.

L’investissement en immobilier est bien orienté et on observe un début d’amélioration de l’investissement en infrastructure, suggérant que les mesures de soutien mises en place par les autorités commencent à se diffuser à l’économie réelle.

En parallèle, la croissance du crédit continue de se redresser progressivement, en partie grâce aux mesures de la banque centrale qui a de nouveau baissé le coefficient des réserves obligatoires pour les banques en septembre.

Les développements relatifs à la guerre commerciale sont plus positifs. Les Etats-Unis ont accepté de reporter une nouvelle augmentation des droits de douanes sur quelques 250 Mds USD de produits chinois, censée intervenir le 15 octobre. En contrepartie, la Chine s’est engagée, entre autres, à augmenter ses achats de produits agricoles et à ouvrir davantage son secteur financier aux entreprises américaines. Cette première étape vers un éventuel accord plus global pourrait être officialisée mi-novembre lors du sommet de l’APEC1.

Sommet de l’APEC1 : la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique est un forum économique intergouvernemental visant à faciliter la croissance économique, la coopération, les échanges et l’investissement de la région Asie Pacifique. Elle se réunit chaque année.

 

Voir aussi : Chine : des signaux mitigés sur la conjoncture

 

L’opinion exprimée ci-dessus est datée du 18 octobre 2019 et est susceptible de changer.

investissement

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